Nous étions retournés au camp, enfin sortis de cet endroit sale et délabré qu'était le quartier pauvre de la Zone résidentielle. J'avais la certitude que cette femme n'allait pas rester parmis nous bien longtemps. Emma avait la force et l'endurance requise pour faire partie de l'armée d'après ce que j'avais pu entendre dire d'elle, mais elle avait également tout d'une tigresse indomptable. Après tout, elle n'avait pas tenté de me gifler, mais bien de me donner un coup de poing au visage, lorsque je lui avais fait une remarque à connotation sexuelle. N'importe quelle autre femme normale m'aurait giflé, au lieu de cela. J'aimais bien cette partie d'elle, malgré tout.

Puis, nous fîmes le tour du quartier général de l'unité spéciale. Emma semblait émerveillée par ce qui me semblait pourtant bien banal. Cela se voyait, elle était tout droit sortie du quartier moins aisé de la Zone résidentielle. On aurait presque pu croire qu'elle n'y était jamais sortie, ce qui semblait, d'un sens, bien étonnant. Et puis après, j'étais certain qu'elle préférait ce qui se rapprochait à du "luxe" plutôt que ce coin crasseux, pauvre et remplis de pouilleux où elle vivait. Cette demoiselle allait apprendre à s'y plaire, se plier aux ordres et ne penser qu'à servir son pays. Sinon, elle allait être expulsée et elle retournerait à son trou perdu

Lorsqu'elle eut vu tout ce qu'il y avait à voir, nous retournâmes au camp d'entraînement. Elle avait faim, j'entendais son ventre crier famine. C'était le moment parfait de la faire travailler dans des conditions horribles. Depuis combien de temps n'allait-elle pas mangé? Cela ne m'importait peu, mais j'espérais que cela fasse assez longtemps. Juste assez pour qu'elle se sente affreusement mal après m'avoir prouvé qu'elle avait sa place ici.

Je n'affichai qu'un sourire sadique.

—Tu vas me faire environ... disons une cinquantaine de pompes ainsi qu'une centaine de redressements assis. Sans pause. Maintenant, j'attends.

Pendant qu'elle faisait son exercice, j'avais pris son arme blanche. Elle semblait y tenir beaucoup, j'allais pouvoir la faire chanter avec ce dernier. J'observai l'étuis recouvert de velours, aux légers motifs floraux de style japonais. C'était joli. Moi, je manipulais très mal les armes blanches, malgré l'entraînement que j'avais eu, lorsque j'étais un soldat. J'étais meilleur avec les armes à feu, bien viser l'ennemi, tout ça. Entre me battre à mais nus ou au sabre, je préférerais à mains nues.

Je ne la regardais pas faire ce que je lui avais demandé, je faisais plutôt surveiller les autres soldats qui étaient encore dehors à cette heure, au cas où ils étaient en train de faire des conneries ou de mauvais coups. Je ne voulais pas la fixer à faire son entraînement, même si cela aurait été amusant de voir son malaise d'être fixée.

Emma se releva ensuite après avoir fait tous ses exercices. Je ne savais même pas si elle avait tout bien fait, mais cela ne m'importait peu. Elle avait l'air épuisée de ce petit test. Et avec raisons : faire de l'exercice physique avec le ventre vide, ce n'est pas de tout repos. On n'a pas toute l'énergie nécessaire à fournir.

Ma future chienne avait remarqué que je tenais son katana. Et elle me jappait et me grognait dessus pour que je le lui rende. C'était bien marrant à voir, on aurait cru voir un chihuahua qui était fâché après son maître. Croyait-elle sincèrement que j'allais lui donner tout simplement parce qu'elle me le demandait? Je lui lançai un regard hautain.

—Que crois-tu? Que si tu demandes, tu recevras? Toi qui a vécu dans un lieu si défavorisé, tu devrais bien le savoir, non? Que vas-tu faire pour le récupérer, ma grande?

Emma me hurla dessus, mais cela me laissait de glace. Si c'était moi qui avais crié, elle se serait retrouvée écrasée au sol, la gorge offerte, comme un vulgaire chien soumis. Je ne faisais que lui offrir mon sourire qui recherchait à la faire souffrir, à la faire souffrir.

À mon plus grand étonnement, par la suite, Emma s'élança vers moi avant de me donner un bon coup de poing dans le ventre. Mon souffle avait été coupé. Je n'avais pas été prêt à encaisser l'impact, du coup j'ai eu mal, affreusement mal. Mais malgré tout, tant bien que mal je tentais de ne rien démontrer, sans lâcher l'étuis de son sabre. J'avais le sourire sadique de tout à l'heure au visage, mais ce dernier était légèrement déformé par la douleur.

Quoi qu'il allait en être, j'allais le lui faire payer. Au moins, elle n'avait pas osé me donner un coup de pied à un endroit encore plus sensible! Sinon, j'aurais probablement été au sol à me tordre de douleur. Heureux que ce ne soit donc pas encore arrivé. Je lui arrachai le sabre des mains et, d'un coup d'étuis, je lui frappai le flanc gauche du plus fort que je pus. J'étais plus violent qu'elle, Emma allait s'en apercevoir rapidement. Avant même qu'elle ait pu faire quoi que ce soit, j'avais écrasé son pied avec le mien pour la garder en place. Je la fixai bien dans les yeux. Je cherchais la moindre trace de crainte. Il fallait qu'elle soit complètement soumise à mon pouvoir.

—Ne cherche pas la merde, petite salope. Tu veux quoi, que je t'extirpe les yeux de tes orbites avant de t'arracher les tripes, te faisant souffrir affreusement pour au final n'avoir qu'une mort lente?

Je faisais peur, définitivement. De la haine, de la rage, voire même un peu de folie voilait mon regard pourtant si neutre, si froid de d'habitude. J'étais supérieur à elle. Cette femme allait comprendre que les hommes étaient plus forts et plus dominants que celles-ci. Les femelles ont toujours été faites pour être dominées par les mâles, en est ainsi tout comme elles ont été faites pour porter les enfants.

Nous eûmes droit à un attroupement d'yeux surpris, étonnés, autour de tout le bordel que nous occasionnions. Aucun ne semblait avoir de pitié, ils voulaient me voir l'abattre, comme cette sale chienne qu'elle était. Tous ces chiens voulaient assister à une mise à mort d'une personne de leur propre race. Le genre humain est dégoutant. Et je ne m'exclus même pas dans ce fait.

Emma me lança ensuite quelques insultes. Rien de bien recherché, en fait. Cela ne pouvait pas m'atteindre. Si elle voulait réellement me faire du mal à l'aide des mots, elle allait devoir mieux me connaître et focusé sur mes points faibles. Sans quoi elle n'allait arriver à rien.

Je reçus ensuite un coup sur la jambe qui maintenant Emma en place, me faisant brusquement retirer mon pied du sien, la libérant ainsi. Avait-elle vraiment osé? Elle devait mourir, c'était clair. Mais j'allais bien évidemment la faire souffrir un peu, avant cela... Je n'aimais pas quand on me manquait de respect ainsi.

Par la suite, mon adversaire tomba à genoux. Probablement que puisqu'elle n'avait pas mangé depuis longtemps, elle devait se sentir faiblir affreusement. Elle n'était pas surhumaine après tout, elle avait besoin de l'énergie et les nutriments que lui apporteraient la nourriture qu'elle aurait ingéré. Elle ne m'effrayait pas.

Je lui assénai un grand coup de pied dans le corps, malgré la douleur que j'avais à la jambe, pour la renverser vers l'arrière. Elle avait continué de me fixer, donc elle l'avait payé. Maintenant qu'elle était sur le dos, elle ne me défiait pas du regard. Les autres soldats semblaient bien enthousiastes à l'idée que je batte cette femme. Mais malgré tout, j'allais lui donner une dernière chance. Si elle s'excusait, j'allais mettre terme à tout ce cirque.

—Si tu t'excuses, tu t'éviteras bien des problèmes, sale chienne.

Elle resta quelques temps sur le dos, le temps de reprendre contrôle sur sa douleur j'imagine. Je l'avais beaucoup malmenée, ce n'était pas surprenant. Je suis quelqu'un d'assez violent, je crois que désormais elle l'avait bien compris. Si elle osait nier une seconde fois son statut de sous-fifre, elle allait en baver encore plus. J'en ai tué pour moins que ça, cette jeune femme devait être heureuse de respirer encore maintenant.

Je la vis se mettre à quatre pattes pour ramper vers moi. Les soldats continuaient de faire tout ce boucan inutile, j'avais envie de leur couper à tous et chacun leurs langues, ils se seraient tût. Elle commença une phrase, mais sans la terminer. Un jeune homme qui voulait faire son clown et l'avait plaquée contre le sol du pied. Je n'étais définitivement pas content. Seul l'alpha de cette meute de sales cabots que nous étions avait le droit de soumettre un autre des siens à son pouvoir. Je le foudroyai du regard, celui-ci recula rapidement, la tête basse. Il avait compris le message, il avait compris qu'il ne valait rien et qu'il ne valait mieux pas intimider l'une des nôtres sans mon consentement.

Après avoir été plaquée contre le sol, elle réussit à me répondre. Ce n'était pas ce que j'espérais. Cette femme était sans aucun doute masochiste. Elle aimait se faire frapper, se faire soumettre et avoir mal. N'importe quelle personne normale aurait abandonné déjà. C'était tant mieux, parce que je n'aimais pas les gens banals. L'originalité me plaisait.

J'avais posé mon pied sur sa tête, appuyant fortement sur celle-ci afin de lui prouver qu'elle mordait complètement la poussière, avec moi en tant que supérieur.

—Répète pour voir?! Tu veux peut-être que je t'égorge devant tous ces chiens aboyants?!

Nous étions tous des chiens. Avides de sang, sauvages. Sans la moindre humanité dans cet instant-là, ou presque.

Elle s'était excusée, finalement. Dans mon estime, elle venait de remonter beaucoup d'un seul coup, mais sans avoir atteint ses autres compagnons d'arme. Je l'avais libérée donc de mon emprise en enlevant ma botte de sur sa tête. Il en fallait du courage pour s'excuser devant une meute de sales clébards enragés et sauvages comme nous l'étions, moi et les autres soldats. J'aboyai aux autres de partir, qu'ils n'avaient plus rien à faire ici. Ils partirent tous sans se faire prier, soumis par le teint agressif de ma voix.

Étant donné qu'Emma avait été réaliste et qu'elle avait fait exactement ce que je lui avais demandé, je lui tendis la main pour l'aider à se relever. Elle qui n'avait subi qu'une mince bribe de l'ampleur que ma rage et ma colère pouvaient prendre. Je pouvais me montrer bien plus violent que cela, si seulement elle savait. D'ailleurs, cette chienne ne voulait pas se rendre jusque-là. Si cette dernière se rendait jusque là, elle allait sans doute me supplier de la tuer pour mettre fin à l'horrible châtiment que j'aurais pu lui infliger.

—Reste pas comme ça au sol.

Je me montrais déjà plus clément avec elle : la preuve je ne la frappais plus, je tentais même de lui donner un petit coup de main à se remettre debout. Mais malgré tout, mon ton était tout aussi ferme et dur qu'à son habitude, il était impossible d'y trouver quelconque douceur. Si Emma voulait se faire traiter en égal avec les autres, elle allait devoir m'obéir au doigt et à l'oeil, comme le faisaient ces sous-fifres. Je n'avais pas envie de me faire désobéir, et donc j'allais user de violence si elle osait aller à l'encontre de mes ordres. À l'armée, c'était le seul moyen pour arriver à se faire respecter, après tout. Si j'étais si haut-gradé, c'était probablement parce qu'on craignait mon courroux et ce depuis que je n'étais qu'un vulgaire fantassin de ces lignes.

Emma fixait le sabre que je lui avais dérobé. Elle le voulait, elle voulait absolument que je le lui rende. Pour ma part, j'avais le devoir de le lui confisquer. Je ne pouvais pas lui faire confiance, encore moins la laisser se balader ainsi avec une arme dans le camp. Elle avait osé s'en prendre à moi, et donc elle pouvait bel et bien être dangereuse. Je n'avais pas envie d'avoir sur le dos la mort de mes hommes.

Cette chienne semblait bien mal en point, mais ce n'était pas mon problème. Toutes ces blessures n'avaient pas été causées par gratuité. Chaque coup que je lui avais asséné était dû à son irrespect. J'espérais grandement qu'elle le savait et qu'elle comprenait qu'à chaque fois que cela allait se reproduire, j'allais la punir ainsi. Cette pousse qui allait donner une magnifique fleur qui aurait dû s'épanouir au milieu de la noblesse n'avait pas d'affaire ici. Cette pousse que j'allais priver de soleil et d'eau n'allait pas pouvoir s'épanouir dans un tel environnement. Je ne me sentais nullement coupable malgré tout. Je me disais au moins que c'était de ma faute si j'avais privé à tous les hommes de son entourage une jolie jeune femme qui aurait pu avoir les manières d'une princesse et l'allure d'une riche noble. Mais bien évidemment, cette image que je lui donnais était tout le contraire de ce qu'elle était...

Après être tombée plusieurs fois de suite, je restais devant elle, sans bouger ne serait-ce que d'un peu ni sans rien dire. La nuit était tombée, mettant fin à toute clarté du soleil. La lune faisait scintiller d'argent ses cheveux d'une blancheur si pure. C'était une magnifique créature. Même avec ce masque de souffrance et de haine envers moi, je la trouvais jolie. Comment une si jolie demoiselle pouvait se retrouver dans un tel endroit? Je me forçai à l'aider à se relever tout en lui offrant comme appui mon épaule.

Et revoilà mon côté humain qui ressortait. J'aurais dû le faire taire.

—C'est suffisant pour aujourd'hui. Tu vas aller dormir pour reprendre tes forces.

J'avais regagné en humanité, mais mon ton n'avait toujours pas changé. Froid et dur, il n'exprimait rien du tout.

Après l'avoir aidée, elle semblait complètement appuyée contre moi. Son équilibre tout entier se basait au mien : si je me permettais de bouger, soit elle suivrait mon mouvement, soit elle s'écroulerait au sol. Je pouvais être cruel, mais cette fois-ci, j'allais me montrer gentil et je n'allais pas la faire tomber au sol. En temps normal, c'était ce que j'aurais fait, sans doute.

Nous nous rendîmes au réfectoire, question qu'elle puisse manger un peu pour reprendre des forces. J'allais la laisser là dès que j'allais en avoir fini avec elle. Emma était une perte de temps plus qu'autre chose. À bien y penser, l'avoir recrutée était une erreur. J'allais la virer dès qu'elle allait faire la moindre chose qui ne me plaisait pas. C'était ça, le meilleur dans être le général d'armée. Je pouvais faire tout ce que je voulais, même si cela allait être considéré comme de l'abus de pouvoir.

Puis, elle me dit indirectement qu'elle ne voulait pas être sous mes ordres. Cela aurait certainement pu me faire péter un plomb, mais je n'avais plus envie de me battre. De toute manière, vu son état, elle n'allait pas pouvoir se battre contre moi. La mettre au tapis allait être un jeu d'enfant, ce n'allait pas être amusant.

En répliquant, je lui lançai un regard hautain, supérieur.
—Tu crois que si tu demandes, tu auras? Rien que pour cette demande, tu m'auras encore plus sur le dos, bravo ma petite!

Et oui. J'allais l'écraser, elle allait être mon bouc émissaire. C'était un manque de respect, ce qu'elle m'avait dit. Avec tout ce qu'elle avait osé me faire, j'allais certainement le lui faire payer, et pas que par sévices physiques.

Emma se laissa tomber sur une chaise, commençant à manger comme elle pouvait. Cela allait lui redonner un peu de forces, mais le pire dans tout cela, c'est que j'avais un peu peur de ne pas pouvoir la maîtriser correctement, si jamais elle avait envie de se retourner contre moi, plus tard, lorsqu'elle allait être en forme. De toute manière, vu comment je l'avais mise au tapis et comment je l'avais faite se surmener, elle n'allait probablement même pas tenter la moindre petite offense contre moi. Cette sale chienne, elle avait peut-être enfin comprise qu'elle n'était qu'une merde, inférieure de beaucoup à moi et je ne parle pas qu'en grades. Cette vulgaire soldate allait en baver et ce jusqu'à ce que j'aie trouvé une solution pour la jeter hors de mes rangs. Emma n'y avait pas sa place.

Je me décidai ensuite à partir, je n'avais plus rien à lui dire, désormais. Cette salope savait où se trouvait le dortoir et où se trouvait la cantine, les deux seuls endroits réellement importants du camp. Je n'avais plus aucune raison de rester encore avec elle, si ce n'était que pour la harceler ou encore la faire souffrir. Non merci, j'avais eu ma dose d'elle, cette journée-là. Je m'étais pris des coups de poings d'elle pour mes remarques perverses, elle m'avait fait face et elle avait, malgré tout, renoncé à son orgueil pour s'excuser alors que c'était probablement moi qui avais été le plus dans le tort. Bien évidemment, d'un sens, je l'appréciais, même si je la haïssais tout autant. Son caractère valait une certaine richesse : il était rare de voir une dame me tenir autant tête. Fougueuse jeune femme qu'elle était, cette dernière avait su m'en mettre pleins la vue. Je ne me laissais d'ailleurs pas si facilement impressionné, c'était cela qui était surtout grandiose, dans tout cela!

Mais malgré tout, au lieu de passer plus de temps avec elle, je ne fis que disposer. Mon lit douillet et mon verre de rhum m'attendaient impatiemment dans ma cabine, je les entendais presque m'appeler de par mon nom.